Dans un cadre urbain, historique préservé et embelli de Nîmes, la Maison Carrée a rejoint les merveilles du monde au patrimoine de l’ Unesco. En dix minutes montre en main. Au nom de la beauté du temple de la Pax Romana de Rome.
Depuis la grande terrasse suspendue du Carré d’Art Jean Bousquet, les passionnés de tarot du vendredi après-midi et les lycéennes qui peaufinent leur dissertation de philosophie ont désormais une vue plongeante sur une des merveilles du monde : La Maison Carrée, inscrite au patrimoine mondial de l’humanité de l’Unesco. L’affaire s’est nouée lundi soir, le 18 septembre 2023 à Riyad en Arabie Saoudite. Il s’agissait de la 45 eme session élargie de l’organisme qui rassemble les ambassadeurs Unesco de 21 pays dont la France, l’Argentine, la Belgique, la Russie, la Grèce, Tunisie… Pour concourir et surtout remporter cette inscription, une première fois ajournée en 2018, les équipes de la mairie de Nîmes ont travaillé d’arrache-pied pour fournir un dossier complet, irréprochable, inattaquable. La candidature s’appuie sur un monument rare, dans un état de conservation exceptionnel, parfait et totalement réhabilité entre 2006 et 2010 au prix d’un investissement considérable de 4,5 M€.
«Nous avons aussi soigné le cône de visibilité de l’édifice en dégageant la rue Auguste, devenue piétonne en juin dernier pour que justement le point de vue sur la Maison carrée soit parfait. Nous travaillons sur ce classement depuis vingt ans. Ce qui signifie beaucoup de travaux engagés dans le périmètre protégé et sauvegardé depuis 2001 » détaille Mary Bourgade, l’élue passionnée et infatigable en charge de ce dossier depuis le point de départ d’un rêve d’Unesco. Au fil, du temps et des approches, les porteurs du projet se sont familiarisés avec les usages et les coutumes diplomatiques en cours dans les grands établissements internationaux. Les « nîmois » ont notamment œuvré pour que ce dossier soit défendu et co-porté par les juges eux-mêmes, c’est-à-dire les ambassadeurs des 21 pays siégeant au comité. La mairie de Nîmes les a invité en juin dernier à découvrir pendant trois jours ce temple magnifique, cette trace ultime de la Pax Romana en province de Nemausus directement inspirée du Panthéon de Rome.
La romanité de Nîmes
Ces mêmes ambassadeurs ont pu aussi de frotter à la romanité de la ville, ces vestiges historiques omniprésents, les arènes bien sûr, le temple de Diane, la porte de France. Les arènes, sont en cours de restauration complète des soixante travées d’ici 2036. Et juste en face ? Le musée de la Romanité, architecture moderne imaginée par Elisabeth de Portzamparc, inauguré en 2018 et qui déjà se fond dans le paysage urbain autour des arènes. En 2018, lors de l’examen d’une première candidature, sur le centre historique de Nîmes, cette proximité entre les hardiesses de l’architecture et l’amphithéâtre, avait fait tiquer les experts de l’ Icomos, l’organisme de certification de l’ Unesco qui avait finalement ajourné l’inscription. Cinq ans plus tard, le scénario de l’examen de la candidature nîmoise, n’a plus rien à voir. Point d’animosité et encore moins de difficultés soulevées. Le rapport d’experte de l’ Icomos est favorable et très positif. L’ambassadeur de l’émirat d’Oman est le seul à prendre la parole en session pour appuyer la candidature « que j’ai eu le bonheur de découvrir par moi-même ». En dix minutes, l’inscription est acquise sans aucun amendement. Ainsi donc, la Maison Carrée édifiée à partir de l’an 1 avant Jésus Christ sur le forum de Nemausus cité des celtes et des gaulois ralliés à Rome, est-il entré dans l’histoire. C’est la cinquante-et-unième inscription pour la France. « Nous serons dignes de la confiance que vous nous accordez » a réagi sur place Jean Paul Fournier, le maire ému aux larmes après vingt ans de parcours du combattant jusqu’au Graal. « Cette inscription c’est la reconnaissance d’une politique urbaine à dimension humaine » a ajouté le maire qui tourne ainsi une page majuscule de l’histoire de Nîmes.
« Forcément, le label Unesco c’est un fléchage formidable. C’est une garantie de qualité. Il existe dans le monde des touristes qui ne visitent que des sites catalogués par l’Unesco. Et nous attendons une significative augmentation de la fréquentation touristique » explique un acteur du tourisme nîmois qui prévoit déjà deux nouveaux hôtels à venir pour 2025 ( quatre et cinq étoiles) dans le sillage du Musée qui a déjà enregistré 770 000 visiteurs. En 2018, ledit musée, modernité sublimée par Elisabeth de Portzamparc avait fait tiquer es experts de l’Icomos. Pensez-donc cette nouvelle architecture dans le sillage immédiat des Arènes ! Aujourd’hui, ledit musée s’est fondu dans le paysage en bel harmonie avec les arènes, dont il partage les couleurs mordorées les soirs d’orage.
Des visiteurs érudits et cultivés
« La ville, notre ville, va ainsi pouvoir mieux rayonner à l’étranger auprès d’une clientèle érudite et cultivée à la recherche d’hospitalité de luxe, que nous sommes capables de leur offrir à l’Imperator » se félicite Jean Bernard Falco, du groupe hôtelier Maison Albar, l’heureux propriétaire avec son épouse Céline, du mythique palace nîmois totalement refait au prix d’un investissement considérable de 25 M€. Ainsi parfaitement équipée avec son coeur de cité restauré, la ville de Nîmes rejoint les merveilles du monde.
Christian Goutorbe