En quelques minutes, les cours d’eau des Cévennes, le Gardon de Saint Jean, l’Hérault et leurs affluents se sont transformés en torrents. Le niveau d’eau dans le lit de ces rivières, a parfois bondi de 7 mètres emportant tout sur son passage. C’est le triste bilan d’un déluge d’une intensité exceptionnelle : jusqu’à 700 mm d’eau en douze heures à partir du samedi 19 septembre 2020.
De fidèle mémoire de cévenol, l’eau n’était jamais montée en puissance aussi rapidement dans la vallée encaissée du Gardon de Saint Jean et encore moins dans le lit supérieur de l’Hérault dans le val d’Aigoual causant dans ce secteur de graves inondations et la disparition de deux personnes.
« Il est tombé beaucoup d’eau en peu de temps. Six cents millimètres au mètre carré en six heures, c’est du jamais observé. Nous sommes vraiment dans un basculement, dans un changement de système météo. Cela s’apparente plus à un phénomène cyclonique que l’on peut rencontrer par exemple à l’île de la Réunion. Ce sont des pluies de type tropical. Habituellement dans les Cévennes, ces cumuls de pluie, on les a sur deux ou trois jours, pas en six heures de temps » explique Alix Roumagnac, président de Predict-Services qui conseille et anticipe les collectivités et les acteurs de la prévention et du sauvetage. « Heureusement que le maire de Saint Jean-du-Gard a pris la décision d’évacuer tout ce qui devait l’être notamment dans les campings. Et heureusement que les gendarmes étaient nombreux pour assurer la sécurité du rallye des Camisards pour organiser les évacuations. Sinon, on courait à la catastrophe » poursuit Alix Roumagnac.
Précipitation devant la montée des eaux
De fait, dans la vallée Borgne entre Saint André de Valborgne et Saint Jean-du-Gard, tous les acteurs de l’épisode racontent la même précipitation vitale pour sauver ce qui pouvait l’être. « On a juste eu le temps de démonter la terrasse et de l’enlever. Cela s’est joué à quelques minutes prés. Sinon, tout partait à la rivière » raconte Pierre, le patron du Panier Fleuri de Saumane. Cet ancien releveur de l’échelle de crue avait pourtant suivi minute par minute sur son ordinateur la montée en puissance du débit impressionnant. « Au plus fort, on a eu 1800 m3/seconde à Anduze. Pour situer, la grande crue de la Seine à Paris en 1910, c’était 2000 m3. Samedi c’était la Seine en crue à Anduze » poursuit Alix Roumagnac. Plus en amont, de Valleraugue à Saint André de Majencoule, de Saint André de Valborgne aux Plantiers c’est le même paysage de destruction : des routes et des ponts détruits, des hameaux isolés, des maisons inondées, des voitures, des camionnettes et des caravanes emportées, des terres agricoles emportées dans la rivière et des campings dévastés par le courant.
Et partout, le même courant de solidarité pour nettoyer, dégager et réconforter.
« C’est un miracle si j’ai pu sortir ma voiture garée dans la rue principale. En l’espace de quelques minutes l’eau était montée aux portières et elle a tout de même démarré. Après c’était l’apocalypse » raconte Daniel, retraité de Saint-André-de-Valborgne une parmi la douzaine de communes les plus touchées par le cyclone cévenol.