La réussite économique et le bien vivre en mer coexistent en parfaite harmonie dans la niche industrielle de la construction des catamarans de luxe. Le salon international des Multicoques qui se tient cette semaine à La Grande Motte en est la parfaite incarnation. Une véritable exception française qui exporte 80 % de « ce bonheur technologique ».
Tantôt sous le soleil, tantôt dans les risées de pluie, c’est une véritable bulle économique de prospérité qui s’est installée jusqu’au dimanche soir 24 avril autour des pontons de La Grande Motte (Hérault). Après deux années de silence dans les voiles, le salon international des multicoques adresse un enthousiasmant bulletin de santé de la plaisance française. La flottille nationale des catamarans ne s’est jamais aussi bien portée avec des progressions à deux chiffres chez tous les opérateurs. « Les confinements successifs ont accouché d’ une nouvelle génération de voyageurs qui ont voulu passer du rêve de bateau à la réalité. Et aujourd’hui la demande est très forte à tel point que nous ne pouvons pas faire face. Entre la commande et la livraison finale le délai actuel dans tous les chantiers français c’est plus de deux ans d’attente. Et la pénurie éprouve aussi le marché de la deuxième main » explique Xavier Desmarest, le PDG d’Outremer qui promet de livrer le plus rapidement possible les bateaux en commande, des méga-voiliers à plus d’un million d’euros pour vivre en mer le parfum vrai de la liberté. La dernière création le 51, nouveau vaisseau amiral de la maison a été couronné catamaran de l’année 2022 aux Etats-Unis comme en Europe. A La Grande Motte, on se bouscule pour embarquer pour la visite.
Filière française biberonnée à l’innovation
Si la filière française est portée par ce courant d’affaires particulièrement dynamique, c’est que la construction nationale s’est engagée, massivement, dans la conception, l’innovation et la construction en France des multicoques qui tirent désormais le marché de la plaisance. « Le marché du monocoque habitable est en perte de vitesse de 4,5 % alors que celui des multicoques prend de l’allure à + 25 %. Il pèse aujourd’hui 511 M€ de chiffre d’affaires. Et cette tendance semble irréversible. Même dans une situation mondiale complexe, on assiste à un début de salon particulièrement enthousiaste. Les clients sont présents au rendez-vous » indique Frédéric Morvant, le co-directeur avec Philippe Michel de M2 organisateur du salon mondial qui a regroupé à flots 61 bateaux et plus de 150 équipementiers dans un hall d’exposition attenant. Pour cette édition 2022, les exposants ont proposé 7 premières mondiales dont le très attendu Catana Océan Class, le nouveau grand catamaran de voyage de la firme historique de Canet-en-Roussillon.
Catana Océan Class
« C’est nous qui avions ouvert ce marché des grands bateaux de voyage voici plus de trente ans. Et nous sommes de retour sur ce marché des voiliers d’exception capables d’aller vite sans sacrifier le confort. Bien au contraire ! Tout en continuant à développer notre gamme Bali avec la présentation aujourd’hui même à La Grande Motte du 4.4, nous lançons une nouvelle génération de ces grands bateaux » explique Olivier Poncin qui espère, une nouvelle fois, dynamiser ce marché de niche à plus d’un million d’euros l’unité plus les options qui sont onéreuses alors que la concurrence fourbit ses propres armes : Le 5X d’Outre Mer ou le nouveau Lagoon.
Avant même l’appontement à La Grande Motte, Catana avait déjà signé six exemplaires de son OC alors que le bateau sera construit au rythme de deux bateaux par mois dans un contexte de rareté de main d’œuvre et de personnel qualifié. « Nous sommes toujours à la recherche d’une centaine d’ouvriers plutôt bien rémunérés pour répondre à la pressante demande actuelle des clients » poursuit Olivier Poncin qui évalue à 1500 la flotte des « Catana » indestructibles qui naviguent toujours partout dans le monde. Parmi les clients de ces constructeurs français on trouve désormais avec grande fidélité les entreprises de location de bateaux (40 % des ventes) dont l’activité a repris « plein vent » après le trou d’air des confinements et des interdictions de voyager. « Nous avons dû forcément réduire la voilure, passer de 1000 bateaux à 850 mais nous sommes en plein redémarrage de l’activité et optimistes pour cette campagne 2022 de vente et de location avec même une notable augmentation des périodes d’activité notamment en zone Méditerranée. Les clients sont capables de louer à partir du mois de mars et jusqu’à fin octobre avec même des taux de remplissage significatifs. Et le catamaran est devenu l’arme absolue de la fidélisation.
L’impossible retour au monocoque
Quand ils ont goûté à une croisière en multicoque, ils ne reviennent jamais en arrière et ne repartent jamais en famille ou entre amis sur un monocoque » explique Loïc Bonnet le fondateur de Dream Yacht Charter le numéro 1 de la location de croisière : les bateaux de la compagnie et aussi ceux qui investissent pour donner leur bien en location. « Une semaine en grand voilier catamaran, cela peut coûter de 10 000 € en avant-saison à 14000 € en pleine saison, au mois d’août en Méditerranée par exemple. Ce n’est pas beaucoup plus cher qu’une semaine en hôtel de grand luxe. On peut facilement naviguer à quatre couples sur de tels voiliers. Le fait d’investir et de donner son bateau en location permet d’écraser les coûts d’entretien et de marina et cela peut représenter un rapport de 8 à 10 % » poursuit Loïc Bonnet lui-aussi enthousiasmé par le démarrage de cette réunion de la grande famille des multicoques à La Grande Motte.
La task force régionale en plein développement
Catana comme Outre-Mer sont confrontés à un problème de surface de production et de main d’œuvre. « Nous sommes actuellement à 17000 M2 de hangar de production de quoi travailler sur 17 bateaux en même temps. Plus l’espace GunBoat mais nous sommes à l’étroit. Nous sommes sur le développement d’un deuxième site de production dans un rayon de transport d’une heure trente. Trois sites sont à l’étude à Sète, Canet en Roussillon et Port Saint-Louis du Rhône » explique Xavier Desmarest. Catana group exploite trois sites en France : à Canet en Roussillon le siège de la maison mère, à Rivesaltes pour la partie menuiserie et à Saint Mandrier dans le Var notamment pour le refit des bateaux. Enfin les plus petits voiliers Bali sont fabriqués en Tunisie.
La force française de production :
Lagoon (groupe Bénéteau, leader mondial) : 500 bateaux par an.
Foutaine-Pajot : 250 unités par an.
Bali-Catana : 180 bateaux par an.
Outremer-Gunboat : 35 bateaux par an.
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